Un sinistre subi par une entreprise (incendie, inondation, catastrophe naturelle…) peut perturber son activité et entraîner des conséquences financières, parfois très lourdes. Des contrats d’assurance destinés aux professionnels et aux entreprises proposent des réponses adaptées.
L’assurance des pertes d’exploitation
Après un sinistre, l’entreprise touchée doit faire face à une baisse d’activité qui peut être longue, voire à un arrêt total de sa production entraînant des conséquences financières importantes.
L’assurance pertes d’exploitation permet à l’entreprise de compenser les effets de la diminution du chiffre d’affaires et de faire face à ses charges fixes ainsi qu’à une baisse de son résultat en couvrant les frais généraux permanents (amortissements, impôts et taxes, loyers, rémunération du personnel, intérêts d’emprunt…). Cette assurance aidera aussi l’entreprise à supporter certains frais supplémentaires consécutifs au sinistre.
L’indemnité versée au titre de la garantie des pertes d’exploitation permet de replacer l’entreprise dans la situation financière qui aurait été la sienne si le sinistre n’avait pas eu lieu. L’assureur et les experts spécialisés recherchent aussi des solutions pour que l’activité reprenne dans les meilleurs délais.
Les événements couverts par l’assurance pertes d’exploitation
L’entreprise peut notamment s’assurer pour les pertes d’exploitation dues notamment aux événements suivants :
- incendie, explosion, chute de la foudre ;
- accidents aux appareils électriques ;
- dégât des eaux ;
- bris de machine ;
- tempêtes, grêle et poids de la neige sur les toitures (seule la garantie tempête est obligatoire) ;
- catastrophes naturelles (garantie obligatoirement délivrée lors de la souscription du contrat d’assurance) ;
- chocs de véhicules terrestres à moteur ;
- émeutes et mouvements populaires, vandalisme ;
- attentats, actes de terrorisme (garanties obligatoirement accordées lors de la souscription).
Les conditions de l’indemnisation
L’assurance pertes d’exploitation n’indemnisera l’entreprise qu’à la condition que cette dernière ait également souscrit une assurance couvrant pour un montant suffisant les dommages matériels directs causés par les événements garantis (incendie, explosion, dégât des eaux…).
Les garanties proposées aux entreprises par l’assurance
L’assurance de base
Lorsqu’un événement garanti se produit pendant la période de couverture l’assurance couvre :
- la perte consécutive à l’impossibilité ou à la difficulté de compenser ses charges fixes et de générer du résultat du fait de la baisse du chiffre d’affaires causée par l’interruption ou la réduction de l’activité, appelée aussi perte de marge brute (chiffre d’affaires – charges variables incluant les charges salariales) ;
- le remboursement des frais supplémentaires d’exploitation engagés en accord avec l’assureur, à la suite du sinistre, pour en limiter les conséquences (location de matériel ou de locaux, installations provisoires, recours à des fabrications extérieures, frais exceptionnels de transport, de publicité, de publipostage…).
Les assurances complémentaires
Pour l’entreprise, ces garanties ont pour objet de couvrir des dépenses qui, bien que résultant directement du sinistre, ne sont pas indemnisables au titre de l’assurance de base, à savoir :
- les frais supplémentaires additionnels engagés afin de maintenir sur le marché des produits et/ou services fournis par l’entreprise assurée afin d’éviter une perte irrémédiable de clientèle ;
- les pénalités de retard éventuellement mises à la charge de l’entreprise en application des marchés passés avec les clients, par suite du retard ou de l’absence de livraison consécutifs à un sinistre garanti.
Les extensions de garantie
Un sinistre qui affecte un fournisseur, un sous-traitant ou une entreprise située à proximité peut avoir des répercussions sur l’activité de l’assuré.
L’assureur peut proposer des extensions de garantie pour couvrir les conséquences de dommages matériels qui, même s’ils n’affectent pas l’entreprise assurée, engendrent néanmoins une réduction voire une interruption de son activité.
L’entreprise peut garantir, sous certaines conditions :
- la carence des fournisseurs de matières premières, emballages et approvisionnements, ou la carence des sous-traitants, des prestataires et clients sous certaines conditions, si eux-mêmes ont subi des dommages matériels résultant d’un incendie ou d’une explosion ;
- l’impossibilité ou l’interdiction d’accès aux locaux de l’entreprise assurée du fait d’un sinistre survenu à ses abords immédiats.
La période d’indemnisation
C’est la période durant laquelle, l’entreprise estime que son activité ne sera pas revenue à la normale après un sinistre.
Il appartient à l’entreprise de fixer la période maximale de garantie au moment de la souscription du contrat. Il est important de retenir la période qui permettra à l’entreprise de redémarrer mais également de retrouver son plein équilibre financier et commercial tel qu’il aurait été en l’absence du sinistre.
Pour évaluer la durée de l’interruption d’activité, de nombreux éléments doivent être pris en compte :
- le temps nécessaire à la reconstruction des bâtiments en tenant compte de toutes les contraintes réglementaires liées soit à l’urbanisme soit à l’activité ;
- le délai de remplacement du matériel et de réapprovisionnement ;
- les délais de fabrication des produits ;
- le caractère saisonnier de l’activité (la période d’indemnisation doit alors comprendre la période de pointe et correspondre à une ou plusieurs périodes annuelles) ;
- la possibilité de maintenir une activité partielle sur le site malgré le sinistre ou sur un autre site ;
- l’existence de goulets d’étranglement, points de passage obligés de la production, et d’autres points névralgiques dont la destruction entraînerait une paralysie importante et/ou longue de la production (centres informatiques, chaufferie centralisée…) ;
- le secteur dans lequel l’entreprise exerce son activité (peu ou très concurrentiel) ;
- la possibilité pour l’entreprise de sous-traiter les opérations sensibles.
Les sommes à assurer pour l’entreprise
La marge brute et son ajustement
Pour fixer le montant de la garantie, la marge brute du dernier exercice connu constitue une base de calcul qui doit être adaptée en tenant compte de la croissance prévisible de l’entreprise et du contexte économique. Il doit ici être tenu compte du décalage comptable entre le dernier exercice clos et la fin de la période potentielle d’indemnisation en cas de sinistre.
Marge brute : exemple de calcul
Compte d’exploitation simplifié d’une entreprise en année N
Chiffre d’affaires (CA) | 1 600 000 euros |
Charges variables (60 % du CA) | 960 000 euros |
Charges fixes | 480 000 euros |
Bénéfice | 160 000 euros |
Marge brute | 640 000 euros |
(Chiffre d’affaires – charges variables) |
Avec une croissance prévisible de 15 % par an, voici les chiffres du compte d’exploitation.
- Année N+1
– Chiffre d’affaires | 1 840 000 euros |
– Charges variables (60 % du CA) | 1 104 000 euros |
- Année N+2
-Chiffre d’affaires | 2 116 000 euros |
– Charges variables (60 % du CA) | 1 269 600 euros |
La marge brute provisionnelle s’élèverait donc à :
- 736 000 euros l’année N+1 (1 840 000 — 1 104 000) ;
- 846 400 euros l’année N+2 (2 116 000 — 1 269 600).
Si elle s’assure pendant l’année N+1, l’entreprise doit donc fixer la garantie à 846 400 euros au minimum.
Il est nécessaire d’augmenter ou de diminuer le capital assuré en fonction des facteurs internes (amélioration de la productivité, campagne publicitaire, lancement d’un nouveau produit, etc.) et externes (environnement économique).
Pour pallier les insuffisances éventuelles de cet ajustement, soit du fait d’une évaluation erronée de la marge brute, soit du fait d’événements imprévisibles au moment de la souscription du contrat d’assurance par l’entreprise, il existe des formules de « rattrapage ».
L’ajustabilité
La plupart des contrats d’assurance d’entreprises comportent une clause d’ajustabilité qui prévoit une majoration automatique de 20 % de la marge brute déclarée moyennant une régularisation de la cotisation à la fin de l’exercice.
Cette régularisation donne lieu à un rappel de cotisation ou à une ristourne.
Les limitations
A l’issue d’une analyse de risque menée en concertation avec l’assureur, il est possible de prévoir contractuellement une limitation de l’indemnisation d’assurance.
Les moyennes ou grandes entreprises peuvent être concernées si elles possèdent plusieurs établissements à activités indépendantes, au moins en partie ; en cas de sinistre, l’entreprise n’est pas totalement touchée et la baisse du chiffre d’affaires est alors partielle.
Dans ce cas, l’indemnité versée est inférieure au montant des sommes assurées : elle correspond à la perte d’exploitation maximale (PEM) dont le montant est fixé contractuellement.
Les franchises
La franchise a pour objectif de sensibiliser l’assuré à une bonne gestion de ses risques. Une franchise laisse une partie des dommages à la charge de l’assuré. Dans les contrats d’assurance d’entreprises, il existe plusieurs formules de franchise exprimées en durée, en valeur, ou en pourcentage de la marge brute ou de l’indemnité.
Le coût de l’assurance pour l’entreprise
Le montant de la cotisation de l’assurance pertes d’exploitation peut dépendre :
- de la nature des activités et de la structure des unités de fabrication (études des ateliers ou des machines qui sont d’éventuels goulets d’étranglement, du matériel de remplacement et des possibilités de dépannage, plan de continuité d’activité, …), ainsi que des protections contre l’incendie ;
- du taux applicable à l’assurance de dommages directs de l’entreprise (incendie, bris de machine, etc.) ;
- de différents coefficients liés à la durée d’interruption de l’activité, à la limitation contractuelle d’indemnité… ;
- de la période d’indemnisation (elle est au minimum de douze mois en cas d’incendie ou d’explosion).
Exemple de sinistre et de mise en jeu de l’assurance de l’entreprise
Une fabrique de jouets est assurée en pertes d’exploitation pour une période d’un an. Le 1er septembre de l’année N, un incendie détruit une grande partie des locaux et du matériel.
Il faut neuf mois pour remettre l’usine en marche et retrouver le niveau d’activité prévu en l’absence de sinistre (le 1er juin de l’année N+1). Pour maintenir l’activité de l’entreprise, il a fallu louer des locaux temporaires et du matériel de remplacement, recourir à des heures supplémentaires. Le coût de ces frais supplémentaires s’est élevé à 138 000 euros. 12 000 euros de frais fixes ont été économisés exceptionnellement.
Le taux de marge brute est évalué à 40 % du chiffre d’affaires, dont 30% pour les frais fixes et 10 % pour le bénéfice.
Eléments chiffrés | En euros |
CA de l’année précédente | 1 520 000 |
CA prévu (compte tenu d’une progression escomptée de 15 %) | 1 750 000 |
CA réalisé | 1 227 500 |
Baisse du chiffre d’affaires (CA) = CA prévu – CA réalisé | 522 500 |
Charges variables (60 % du CA réalisé) | 736 500 |
Charges fixes (30 % du CA prévu — Frais fixes épargnés) | 513 000 |
Frais supplémentaires engagés | 138 000 |
Total des charges et des frais = Charges variables + Charges fixes + Frais supplémentaires | 1 387 500 |
Compte de résultat : solde négatif = CA réalisé – total des charges et des frais | — 160 000 |
Bénéfice escompté non réalisé du fait du sinistre 10 % du CA prévu | 175 000 |
Perte de la marge brute (baisse du CA x taux de marge brute de 40 %) | 209 000 |
Frais supplémentaires engagés | +138 000 |
Frais fixes épargnés | -12 000 |
Indemnité versée = Perte de la marge brute + Frais supplémentaires engagés — Frais fixes épargnés | 335 000 |
L’indemnité pertes d’exploitation de 335 000 euros permet de compenser la perte de 160 000 euros et de reconstituer le bénéfice escompté de 175 000 euros.
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